D’ici trois minutes tu auras le loisir de faire tiennes plusieurs leçons communément apprises par la pratique des arts martiaux sans avoir à encaisser le moindre coup (ce qui n’est pas négligeable !), la possibilité de te mettre toi-même au Kyokushinkai, au Kajukenbo ou au Krav maga si l’envie te vient et, qui sait, avoir une vision sur ce que ces pratiques peuvent nous enseigner dans un contexte professionnel ou en développement personnel.
Cela fait plusieurs années que je pratique une forme de « self defense » dérivée du Karaté comprenant, en vrac : de la « boxe pied – poing », des clés d’immobilisation, des saisies et dessaisies, une part d’engagement au sol et une préparation psychologique à la confrontation. Voilà quelques éléments transmis lors des cours, qui peuvent se révéler d’une grande aide dans la rue ou en situation de travail (et sans avoir à retourner la biomécanique de ses collègues contre eux, excusez du peu).

Roy Lichtenstein’s - “Sweet Dreams, Baby!”
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Published by Original Editions, New York
« Faire du mieux possible avec ses moyens physiques ou psychologiques »
C’est l’un des postulats de base : faire du mieux possible avec les moyens que l’on a à sa disposition. Contrairement aux compétiteurs s’affrontant sur le tatami, qui sont pour le moins volontaires, les pratiquants de « Self defense » possèdent des conditions physiques très disparates. Et bien peu importe en réalité car le but recherché n’est pas de finir premier d’une compétition. L'objectif premier de chaque pratiquant est de trouver dans l’arsenal des combinaisons lui permettant de se débrouiller au mieux face à une situation conflictuelle.
Le second objectif, qui est en réalité le principal, est d’enclencher une réaction. Saviez-vous qu’en situation de stress l’essentiel des gens réagissent par l’apathie et subissent donc l’événement sans réagir. Ceci est bien entendu valable pour une agression « physique » mais aussi « psychologique ».
Trois attitudes sont connues : la fuite, l’opposition, l’apathie (la soumission).
Comment se prémunir de l’apathie ? En visualisant l’événement redouté et en s’imaginant réagir. Le cerveau peut être trompé, soit en l’accoutumant petit à petit à une situation conflictuelle, soit en intégrant peu à peu la réaction que vous souhaiteriez avoir. La première technique cherche à réduire le stress alors que la seconde tente d’enclencher la réaction salvatrice.
Bien entendu je ne vous conseille pas de faire la démonstration de la toute-puissance de votre « space kung-fu » lors de votre prochain entretien annuel d’évaluation mais de vous acclimater à l’événement redouté (entretien de recrutement, animation d’atelier, conférence, etc.) et à visualiser l’attitude la plus adaptée à la situation.
« Se relever… Et vite ! »
L’une des situations les plus compliquées à gérer est celle du combat au sol. Le poids joue. L’élan initial amplifie tout impact. Celui qui tombe encaisse le choc de la chute, la rudesse du bitume et l’amertume du gravier. Les chocs au sol sont d’ailleurs l’une des principales causes de K.O (Knock out ou « mise hors de combat par perte de connaissance »). Au sol, tout devient bizarre. Les angles de vues sont perturbés, la troisième dimension se débine et les distances changent en mettant immédiatement les compétiteurs au contact. S’il existe quelques techniques de frappes pour mise à distance de l’assaillant, la chute induit une réaction : tenter de se relever et vite. Même à l’aide de deux ou trois points d’ancrage au sol, se relever est toujours compliqué et marque un temps de vulnérabilité. Mais moindre que rester à compter les graviers le temps que ça passe.
Il en est de même dans la vie professionnelle ; se relever est une activité commune qu’il faut apprendre à pratiquer. Est-il envisageable qu’un commercial fasse la tête à chaque offre commerciale rejetée ou qu’un développeur entre en catatonie à chaque fois qu’un bug apparait en production ?
Les professionnels des RH l’auront identifié : nous parlons bien ici de résilience.
Quelques techniques pour réduire le temps nécessaire pour se relever d’une petite (ou moyenne) contrariété ? Lutter contre le « syndrome de l’imposteur » (par lequel nous ne nous considérons comme pas ou peu légitime à assurer les fonctions que nous pouvons avoir ou celles auxquelles nous aspirons), travailler son estime de soi ou adopter une logique « test and learn » dans chaque expérience personnelle ou professionnelle (ça n’a pas fonctionné mais j’ai appris que …).
Multiplicité des techniques versus efficacité

Techniques de niveau avancé (sic)
Voyons voir ce que nous avons au catalogue offensif : pieds (2), poings (2), coudes (2), genoux (2).
Apportons un peu de complexité :
- frappe du membre avant ou du membre arrière ? Direct ou crochet ? Uppercut ? Epaules gérées à la manière de la boxe anglaise ou de la boxe wing chun ?
- Et la main, que fait-elle : paume ouverte ? poing fermé ? doigts tendus ? (Ce qui joue sur la portée et la robustesse du poignet).
- Et en défense ? parade, esquive sans retrait, pas en arrière ? Axial ? Latéral ? Saut vrillé ?
- Et les gants ? gants de boxe anglaise ? gants de karaté contact ou de MMA ? à mains nues ?
Bref ! Stoppons là, l’arsenal possible est presque sans fin. Et nous n’avons même pas parlé des combinaisons ou autres feintes. Le problème pour un praticien occasionnel (ce qui est mon cas) c’est que l’arsenal possible est top vaste pour être maîtrisé. Il faut donc choisir parmi le catalogue de coups et de protections quels sont les automatismes que vous allez particulièrement travailler.
Au boulot, il en est de même. Il est possible d’utiliser les outils et méthodes en vigueur dans votre entreprise ou de tomber dans les méandres du Shadow IT (l’art de ne pas utiliser les solutions proposées par l’entreprise, pour de bonnes et parfois moins bonnes raisons) au profit de solutions non déclarées auprès de la direction informatique. Ce que je vous encourage à faire, sans exploser la politique de sécurité de votre structure (ce qui pourrait vous être reproché) c’est de composer votre propre catalogue d’outils. Pour ma part, un Kanban, quelques mindmaps et quelques principes d’organisation (inbox zéro au moins deux fois par semaine, réunion de 15 ou de 45 minutes, ordres du jour attribuant les tâches avant la tenue d’une réunion, etc. ) suffisent habituellement à mon organisation.
En guise de conclusion : « un peu de sûreté psychologique serait bien nécessaire »
De toute évidence, ces techniques d’auto-défense professionnelles n’auraient aucune utilité si l’ambiance au travail était marquée d’une authentique sûreté psychologique. Combien de fois vous êtes vous retenus d’intervenir en réunion par peur de dire une ânerie, de poser une question car le contexte ne vous paraissait pas clair ou qu’une pseudo autorité (hiérarchique le plus souvent mais aussi experts plus ou moins autoproclamés) étaient présente dans la même réunion que vous ?
La sûreté psychologique, c’est la base de tout collectif. Comment pensez-vous pouvoir exploiter, dans le bon sens du terme, la valeur de tout un chacun si personne n’ose lever la main pour partager son avis, émettre une alternative ou expliquer à un chef qu’il se gourre misérablement.
Puisque la mode est aux méthodes agiles, n’hésitez pas. Sans sûreté psychologique, pas d’échanges possibles, pas de négociations à cœur ouvert, pas d’autogestion possible de l’équipe, pas de transparence, pas d’amélioration continue. Bref, rien qui ne puisse permettre de dire que « les gens et leurs interactions comptent plus que les processus et les outils ».
Et vous, souffrez-vous d’un manque de sûreté psychologique au travail ou avez-vous développé vos propres techniques d’auto-défense ?
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